Journal du Roubaisien Paul Destombes
Qui eût pensé, il y a un an, quand nous assistions aux brillantes et bruyantes fêtes de la Mi-carême à Nice, qu’en 1915, à la même date, nous aurions vécu des journées d’affreux isolement ? Comme le Mardi Gras, le jeudi de la Mi-carême s’écoule dans le grand calme de l’attente ! Les Allemands affichent une victoire d’importance en Champagne, pareille à celle qu’ils auraient remportée sur les Russes aux lacs Mazures. En ce jour de Mi-carême, ils s’accordent l’unique déguisement qui est permis : celui de la Vérité.
Un aéroplane anglais a lancé deux bombes sur une station téléphonique installée au sommet de la nef de Saint-Martin. L’église en a souffert naturellement ; mais l’opération a eu un résultat important pour les communications allemandes.
En me promenant dans le voisinage de la gare, j’assiste au chargement d’un des nombreux trains qui emportent nos dépouilles en Allemagne. Je vois des wagons marqués Berlin, Cologne, Munich, où sont empilés des bois de charpente, d’importantes pièces mécaniques, des tours qui proviennent soit de nos usines, soit des ateliers de nos principaux constructeurs : Devallée, Paulus, Rys-Catteau. Chez ces derniers, on signale l’enlèvement de métiers brevetés, inconnus jusqu’alors en Allemagne ; c’est une belle « proie » comme disent nos ennemis dans leurs bulletins de victoires. En 1870, ils « faisaient » les pendules ; en 1915, ils sont plus pratiques.
Sur le traitement des prisonniers allemands
Article tiré de l’écho des marchés à Issoudun.
Le réseau d’ Ernest Deceuninck exfiltre un aviateur anglais
né à Saint-André en 1877
Ernest Deceuninckétait représentant de commerce à Armentières. En août 1914, il fut mobilisé et participa aux combats qui se déroulaient dans la région de Tournai. Ernest rencontra quelques temps après Eugène Jacquet et intégra son organisation. Le groupe organisait le rapatriement en France non occupée et en Angleterre des soldats français et anglais qui voulaient rejoindre les lignes alliées. Ernest mit sur pieds la plupart des réseaux d’évasion. L’organisation ne rencontra aucun obstacle véritable. Mais les difficultés apparurent lorsque les évasions devinrent fréquentes. Le 11 mars 1915, les membres de l’organisation aidèrent l’aviateur anglais Mapplebeek à s’éloigner de Lille et à rejoindre les Alliés.
http://circuit1418.free.fr/14-18page6.htm
Blessé le général Maunoury atteint de cécité totale
Le 11 mars 1915, allant visiter les installations du 8ème corps à l’ouest de Soissons, le général Maunoury est blessé par une balle qui lui traverse la tête, enlevant un œil et blessant gravement l’autre, il reçoit la médaille militaire sur son lit d’hôpital le 14 mars 1915 et survit à cette terrible blessure mais est atteint de cécité totale.
http://www.leraincy.fr/content/article/evenement-en-septembre
Lettre à Lou de Guillaume Appolinaire
Nîmes, le 11 mars 1915.
De toi depuis longtemps je n’ai pas de nouvelles
Mais quels doux souvenirs sont ceux où tu te mêles,
Lou, mon amour lointain et ma divinité,
Souffre que ton dévot adore ta beauté !
C’est aujourd’hui le jour de la grande visite
Et, tous, mon cher amour nous partirons ensuite.
C’est question de jours. Je ne te verrai plus
Ils ne reviendront plus les beaux jours révolus…
Sais-je, mon cher amour, si tu m’aimes encore ?
Les trompettes du soir gémissent lentement
Ta photo devant moi, chère Lou, je t’adore
Et tu sembles sourire encore à ton amant.
J’ignore tout de toi ! Qu’es-tu donc devenue ?
Es-tu morte es-tu vive et l’as-tu renié
L’amour que tu promis un jour au canonnier.
Que je voudrais mourir sur la rive inconnue !
Que je voudrais mourir dans le bel Orient
Quand, Croisé, j’entrerai fier dans Constantinople.
Ton image à la main, mourir en souriant
Devant la douce mer d’azur et de sinople(1) !..
Ô Lou, ma grande peine, ô Lou, mon cœur brisé,
Comme un doux son de cor ta voix sonne et résonne,
Ton regard attendri dont je me suis grisé
Je le revois lointain, lointain et qui s’étonne
Je baise tes cheveux, mon unique trésor,
Et qui de ton amour furent le premier gage
Ta voix, mon souvenir, s’éloigne, ô son du cor.
Ma vie est un beau livre et l’on tourne la page
Et souviens-toi parfois du temps où tu m’aimais
30 L’heure
Pleure
Trois
Fois
[…]
Guillaume APOLLINAIRE, Lettres à Lou.
(1) sinople : couleur verte
(2) Adieu mon Lou mes larmes tombent. Je ne te reverrai plus jamais Entre nous deux, ma Lou, se dresse l’Ombre
Ecrivain mort à la guerre
Louis Sailhan – 1880 – 11 mars 1915 à Perthes-les-Hurlus (Champagne).Poète.
Lu dans Le Miroir en date du jeudi 11 mars 1915
En Champagne, toutes les contre-attaques allemandes ont été repoussées : nous avons consolidé nos positions. Les pertes ennemies, ici aussi, sont très sensibles.
En Argonne, nous démolissons un blockhaus et enlevons des tranchées. Un combat se livre entre le Four-de-Paris et Bolante. Sur les Hauts-de-Meuse, nous avons bouleversé des tranchées ennemies.
Un huitième sous-marin allemand a été coulé.
Italie.-Une entrevue, qui provoque beaucoup de commentaires, a eu lien à Rome, entre MM. Salandra et de Bülow.
La déclaration du nouveau cabinet grec est trop vague pour qu’on puisse en inférer une conclusion quelconque